Camille Pascal : LEté des quatre Rois, juillet-août 1830.
Plon 2018, réédition Pocket 2019.
Il est des heures où lHistoire semballe. La Révolution de 1830 en est un bon exemple. En quelques journées dété surnommées « Les trois Glorieuses » et marquées par une chaleur caniculaire, la dynastie régnante des Bourbons est démise du pouvoir, lespoir dun retour à la République balayé, la revanche de la branche dOrléans jusque là soigneusement écartée du trône enfin consommée. Lors de ces heures incertaines, comme lindique le titre choisi par Camille Pascal quatre rois sont en présence : du côté des Bourbons, Charles X qui finalement va se résigner à abdiquer, mais de très mauvaise grâce ; son fils le duc dAngoulême, intellectuellement incapable de gouverner et sujet à des crises dépilepsie, qui ne régnera que quelques heures sous le nom de Louis XIX ; et son petit-fils le duc Henri de Bordeaux, âgé de 9 ans, que son grand-père accepte de désigner comme lhéritier du trône. Côté Orléans, lindécis Louis-Philippe, que plusieurs élus républicains et banquiers daffaire, inquiets dun possible retour aux excès de la Terreur, sortent de sa retraite bourgeoise et familiale pour lui confier les rênes dune nouvelle monarchie constitutionnelle.
Dun style alerte qui tutoie agréablement limpertinence, et sans occulter la réalité de la violence qui sinstalle notamment dans les rues parisiennes, Camille Pascal fait revivre heure par heure les réactions publiques ou intimes des principaux personnages mêlés à cette période agitée. Que ce soit Charles X, qui transforme sa fuite à travers la Normandie en un voyage dagrément sur les terres de ses sujets, sa belle-fille la duchesse de Berry toute émoustillée par les beaux soldats de la Garde, la rogue duchesse dAngoulême qui croit revivre la fuite à Varennes, où encore Louis-Philippe surpris en robe de chambre, son fameux toupet postiche posé sur une table de nuit, tous prennent sous la plume de Camille Pascal une dimension humaine qui nest pas le moindre charme de louvrage. On y croise également dautres personnages qui, déroutés par des événements quils navaient pas prévus, hésitent sur le parti à prendre. Ainsi La Fayette, se croyant dabord le seul recours républicain, doit déchanter et remiser ses ambitions pour se rallier à Louis-Philippe, tandis que Talleyrand, fidèle à lui-même, manigance pour apparaître comme le seul meneur de jeu. Les banquiers Casimir Périer et Lafitte avancent leurs pions, le journaliste républicain Thiers craint le retour des pires heures de la Révolution. Comme à son habitude Stendhal « égotise » et court le guilledou. Chateaubriand prépare de beaux discours
Le livre de Camille Pascal, qui a reçu le Grand Prix du Roman de lAcadémie française, est plus quun roman. Fin connaisseur de lHistoire, lauteur a réussi de façon vivante et fort plaisante à reconstituer ces journées embrouillées de lété 1830 qui annonçaient déjà les soubresauts du XIXème siècle.