Dimitri Casali
Le grand procès de l'histoire de France. Robert Laffont, 2019. 20 euros.
Depuis de trop nombreuses années,écrire l'Histoire de France semblerait être devenu un exercice obsolète voire illégitime. En effet certains historiens (ou groupes politiques), qui confondent à l'excès recherche historique et engagement militant, ont investi l'Université puis l'Éducation Nationale pour essayer de faire passer l'idée que l'histoire du peuple français ne serait qu'un océan d'indignité. C'est, à l'évidence, une lecture très partiale et partielle des phénomènes historiques. Ce mode de pensée qui poursuit des objectifs essentiellement partisans cherche à couper les enfants (et l'ensemble de la population) de l'histoire de leurs aïeux en les présentant comme des criminels. Dans son dernier ouvrage, "Le grand procès de l'Histoire de France", Dimitri Casali montre que pour mieux effacer des mémoires jusqu'à l'appartenance à une nation, des associations et des organisations militantes instrumentalisent l'histoire de France en lançant des offensives dans les médias qui, pour une partie, relaient leurs propos et leurs actions. Ces militants somment par exemple les autorités constituées de changer des noms de rues ou d'écoles qui leur déplaisent. Ils veulent faire de Clovis, Saint-Louis, Jeanne d' Arc, Louis XIV, Voltaire, Napoléon ou Jules Ferry des personnages qui ne sont plus liés à leur époque mais deviennent des repoussoirs. Ces "grands hommes" sont réduits à des caricatures qui ont bien peu à voir avec les réalités historiques. En procédant ainsi ces associations, que Dimitri Casali nomme clairement, non seulement proposent en creux leur vision proprement mythologique de l'Histoire mais empêchent tout à chacun d'accéder aux méthodes et raisonnements historiques qui permettent de s'éloigner des discours manichéens. Ce n'est plus de l 'Histoire mais un Tribunal (d'où le titre du livre) et, qui plus est, un tribunal uniquement à charge dirigé par de petits Fouquier-Tinville qui ne s'embarrassent guère des subtilités de l'Histoire. Leur objectif, plus ou moins conscient, est d'en finir avec l'Histoire même, renouant notamment avec l'idéologie totalitaire des partis communistes du 20ème siècle.
Dimitri Casali veut donc rétablir de manière rigoureuse la réalité des personnages mis à mal en prenant de nombreux exemples. Clovis "trop chrétien pour notre époque", Charles Martel expulsé des programmes de 5ème parce que symbole de "la résistance à l'invasion arabo-musulmane", Jean- Baptiste Colbert dont on ne veut retenir que le Code Noir de 1685 et la traite négrière.
Bien évidemment personne, ni à fortiori les historiens, ne peuvent réduire un homme à un fait. Ecrire l'Histoire n'est pas (ou ne devrait pas) consister à dresser des réquisitoires en jugeant le passé en fonction des normes contemporaines. Dimitri Casali révèle que, dans leur rage moralisatrice, ces nouveaux inquisiteurs réintroduisent parfois la notion de race allant jusqu'à organiser des manifestations "interdites aux Blancs", voire à interdire dans certaines universités des pièces de théâtre ou des conférenciers qui leur déplaisent. Ainsi remettent-ils au goût du jour un vieux thème bien connu des historiens... la censure ! Ce livre de Dimitri Casali, audacieux et incisif, permet de mieux comprendre les enjeux actuels de l'enseignement de l'Histoire de France.