Jean-Joël Bregeon et Gérard Guicheteau
Les Tyrannosaures de la République
Éditions du Rocher (2017) 18 euros
Les " Tyrannosaures de la République" est un ouvrage éclairant à double titre.
Il nous renvoie, tout d'abord, à la réalité la plus crue en dirigeant les projecteurs sur les années 1793-1794 au cours desquelles nombre de responsables révolutionnaires ont servi avec zèle la Terreur érigée en système de gouvernement des hommes. Ensuite, les auteurs, Jean-Joël Bregeon et Gérard Guicheteau, nous rappellent que pendant des dizaines d'années (près de 70 ans) la gauche marxiste et ses alliés ont sciemment ignoré, voire distrait aux regards, certains faits qui dérangeaient leur explication (simpliste) du monde.Aujourd'hui, le constat est affligeant à propos de cette histoire hémiplégique... À tel point que bien des historiens tentent maintenant non plus de disculper mais de minorer le rôle des superprédateurs que furent les"Tyrannosaures” de la 1ère République française. Car ces partisans d'une Histoire tronquée pensent encore pouvoir nous convaincre de l'innocence du plus fameux d'entre eux : Robespierre. Ces mêmes experts qui dénoncent souvent le complotisme voient pourtant des complots partout dès qu'il s'agit de défendre leur héros. Dans leur volonté farouche de trouver des excuses à Robespierre pour les crimes commis en Vendée (et ailleurs !) ils cherchent à vendre l'idée que le Comité de salut public ignorait tout des actes perpétrés par ses subordonnés. Dans les pages de ce livre, qui remettent l'Histoire à l'endroit, les auteurs brossent avec précision les portraits de quelques-uns des révolutionnaires qui agissaient au sommet de l 'État comme Fouché , Collot d'Herbois, Barras, Fréron sans oublier le "cinquième cavalier de l'Apocalypse" Étienne Chrisostome Maignet qui s'illustra cruellement dans le Lubéron, à Bédoin, en faisant guillotiner plus de soixante " suspects" pour avoir abattu un arbre de la Liberté.
Parmi les autres "Tyrannosaures” tristement célèbres, citons Barère, cynique "marchand de phrases" qui dénonçait avec indignation les "fusillades de Lyon" alors qu'il les avait lui-même ordonnées. Dans cette peinture de la période terroriste de longues citations extraites de pièces d' archives plongent le lecteur au plus près de la sanglante réalité révolutionnaire. Car les petits tyrannosaures peuvent se montrer aussi sanguinaires que les grands. Ainsi, Turreau, Général en chef des "Colonnes infernales", écrivait le 25 janvier 1794 au Comité de salut public :"Enfin si mes intentions sont bien secondées, il n'existera plus de Vendée sous 15 jours,ni maisons, ni subsistances, ni armée, ni habitants (...) je désespère de nepouvoir incendier les forêts..." De même, le Général Lachenay constatait :"Les femmes sont violées, pillées, mutilées (...) Le Général Amey fait allumer des fours et il y jette les femmes et les enfants"... y compris les femmes réputées patriotes.
Ce qui ressort de ce livre, c'est que petits et grands prédateurs ont commis mille cruautés au nom de belles idées abstraites : le pouvoir exercé au nom du Peuple, la lutte contre la tyrannie, les Droits de l'homme... Deux cents pages à méditer et à faire partager.