Histoire dune famille darchitectes de Vaugirard (Partie 3)
(1880-1929)
Par Gilles Ragache
De fait bien des commerces ont été à lorigine de lédification des immeubles du cabinet Ragache. En effet, comme pour le Congrès,la construction de limmeuble résultait souvent de la volonté douvrir un commerce. Cest le cas pour une librairie ouverte rue de lEcole de Médecine dans le quartier de lOdéon. A cet endroit Messieurs Vigot et Maloine deux libraires très connus spécialisés dans les ouvrages de médecine voulaient à tout prix rester au plus près de la nouvelle faculté édifiée depuis peu de lautre côté de la rue. Mais pour cela, il ne restait de disponible quune étroite parcelle de seulement 4 à 7 mètres dans sa plus grande largeur.Pourtant, à leur demande, le cabinet «H. Ragache» conçut un immeuble dans le but premier dabriter la librairie en rez-de-chaussée.Au-dessus, très étroit malgré sa belle façade de pierre de taille, limmeuble nétait destiné quà héberger de petits appartements locatifs afin derentabiliser lopération. Le cabinet «H. Ragache» a aussi beaucoup construit dans le 15e dont un grand immeuble à langle de rue Lecourbe et du boulevard Garibaldi qui, depuis lorigine, abrite une vaste agence du Crédit Lyonnais. Egalement rue Lecourbe mais face à la rue des Volontaires (et donc face à lemplacement quoccupait autrefois Le Grand Salon) ils ont édifié un bel immeuble dangle où aujourdhui fonctionne toujours une pharmacie.
Le renfort des entrepreneurs.
Certes, le succès du cabinet «H. Ragache» peut sexpliquer par la solidité professionnelle des quatre architectes qui le composaient mais aussi par la très bonne connaissance quils avaient de Paris, leur ville natale, et particulièrement du 15e arrondissement. A cela on doit ajouter les liens très solides quils sont parvenus à nouer avec des entrepreneurs locaux dont Pierre-Alexis Valleron, un «Creusois de Paris» comme beaucoup de spécialistes de la pierre de taille à cette époque. Après le décès de celui-ci Pierre Bourseau, qui possédait un important chantier à Vaugirard (rue Vigée Lebrun) prit la relève et assura lédification de deux grands immeubles boulevard Saint Michel face aux jardins du Luxembourg ainsi quà langle de la rue de lAbbé de lEpée. Les entrepreneurs Athanase Bassinet[1]et Adolphe Chérioux exerçaient aussi à Vaugirard même si leurs chantiers sétendaient souvent à lensemble de la capitale. Leurs constructions furent particulièrement nombreuses et réussies aux alentours de la mairie du 15e dont un immeuble à la façade Art Nouveau, sur la place qui porte désormais le nom dAdolphe Chérioux. Celui-ci, devenu un ami dHenri Ragache fut élu Président du Conseil de Paris en 1908. Il fut une personnalité bien connue dans la capitale pendant des années. Le cabinet dHenri Ragache mena aussi plusieurs chantiers en liaison avec le monde associatif dont «Les Charpentiers de Paris», une active association de Compagnons fondée en 1893 à Vaugirard par Louis Favaron.
Né dans le 15e arrondissement en 1946, Gilles Ragache est Maître de conférences en Histoire contemporaine et diplômé de Sciences Po. Paris. Il a publié de nombreux ouvrages dont en 2017 «De Gaulle lor, le dollar et la France» (CPHF Editions) ou «LOutre-Mer français dans la guerre (1939-1945)» (Economica. 2015). A propos de lhistoire de Vaugirard et de larchitecture parisienne voir en particulier «Histoire dune famille darchitectes parisiens du Premier Empire à la Belle Epoque» Editions Charles Hérissey.2003.
Une version illustrée et annotée de cet article a été publiée dans VAUGIRARD-GRENELLE le bulletin de la Société Historique et Archéologique du 15earrondissement de Paris. N°53 Printemps 2019.Vous pouvez vous le procurer auprès du Président de lAssociation, M.François de Béru. Mairie du 15e. 31 rue Péclet. 75015 PARIS.
Appel aux lecteurs
Le Grand Salon a fonctionné sans discontinuer à Vaugirard de 1765 à1885 soit pendant plus dun siècle. Cette vaste bâtisse aujourdhui détruite mais encore présente dans la mémoire de certains peut être répertoriée suivant les documents sous diverses appellations dont LeGrand Salon mais aussi le Bal Ragache ou encore La Salle Ragache suivant les périodes de lHistoire. Il sy est déroulé de nombreux mariages, des concerts, des bals publics ou privés, des meetings politiques, des «repas de corps» comme ceux des imprimeurs ou des tailleurs de pierre. Même si de nombreux éléments ont déjà été réunis pour rédiger «A lenseigne du Grand Salon. Au 53 de la rue de Sèvres était le Bal Ragache (1765-1885)», il est probable que dautres documents permettant de retracer la vie de ce lieu si fréquenté restent à découvrir dans des archives privées, publiques ou chez des collectionneurs. Lauteur de ce livre recherche en particulier des menus, papiers à en-tête, factures, publicités, affiches(car on donnait de nombreux concerts au Bal Ragache) mais aussi des croquis, peintures, gravures ou photographies représentant le bâtiment, en particulier sa façade ainsi que lintérieur du Grand Salon dont la salle de bal, les escaliers, les salons privés, les salles de billard...
Merci davance de faire parvenir déventuelles informations à gilles-ragache@orange.fr
[1] Athanase Bassinet, lui aussi «Creusois de Paris» fut élu sénateur de 1900 à1914.